
Articles sur l'Anthropocène
Des articles de fond sur l'Anthropocène
Qu’est-ce que le puits de carbone forestier ?
Le puits de carbone n’est pas une “fonction des forêts”, mais une phase transitoire des dynamiques forestières


La forêt puits de carbone ? Source : Image par Robert Balog de Pixabay, https://pixabay.com/fr/photos/des-arbres-for%C3%AAt-brouillard-brumeux-975091/.
Les forêts, à l’instar des écosystèmes en général, sont souvent présentées comme remplissant des fonctions essentielles qui nous rendent de précieux services, communément appelés “services écosystémiques”*. On parle ainsi de la “multifonctionnalité” des forêts pour souligner la diversité de ces fonctions. Parmi celles-ci, la séquestration du carbone occupe aujourd’hui une place centrale dans le débat public. Vous avez ainsi peut-être déjà entendu dire que la forêt joue un rôle de “puits de carbone” — ou encore de “pompe à carbone” — contribuant à atténuer l’effet de serre et, par conséquent, le changement climatique.
Cet article propose d’examiner de plus près le fonctionnement et la dynamique de ce puits de carbone forestier. Ce faisant, nous verrons qu’il ne s’agit nullement d’une fonction intrinsèque ou d’un rôle stable des forêts, mais plutôt d’un phénomène transitoire, inscrit dans un cycle plus large.
Une expérience de géophysique à grand échelle
Depuis 1850, notre civilisation thermo-industrielle a entrepris une gigantesque expérience de géophysique en émettant plus de 2500 milliards de tonnes (ou gigatonnes) de CO2 (soit plus de 675 gigatonnes de carbone, GtC, 1 tonne de CO2 contenant environ 0.27 tonne de carbone**) dans l’atmosphère [1], faisant passer la teneur atmosphérique en CO2 de 280 parties par million (ppm) en 1850 à plus de 420 ppm en 2024 [2, 3] ! Une évolution absolument démentielle lorsqu’elle est remise en perspective du temps long (Figure 1). Les émissions n’ont d’ailleurs jamais été aussi fortes qu’actuellement, atteignant de l’ordre de 40 milliards de tonnes de CO2 par an (~11 GtC ) [3].


Figure 1 : Évolution de la concentration en dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère depuis 800 000 ans. Au cours des centaines de derniers milliers d’années, la concentration en CO2 a oscillé en lien avec l’alternance des périodes glaciaires et interglaciaires, mais est toujours restée inférieure à 300 ppm. Depuis 1850, en raison notamment de la combustion de ressources fossiles par l’activité humaine, la concentration en CO2 est passée de 280 ppm à plus de 420 ppm aujourd’hui ! Source des données : Our World In Data [4].
Cette expérience d’enrichissement ultra-brutal de l’atmosphère en CO2 a une conséquence évidente compte tenu du fait qu’il s’agit d’un gaz à effet de serre : une élévation tout aussi brutale de la température de surface de la Terre [5]. Une évolution si soudaine et d’une telle amplitude qu’elle fait peser une menace d’ordre existentiel sur la civilisation thermo-industrielle, qui a donc fini par se rendre à l’évidence qu’il faudrait peut-être faire quelque chose pour limiter le phénomène.
Las, notre civilisation ayant fait de la croissance économique son axiome fondateur et sa raison d’être, la voici bien incapable de remettre en cause ce dogme radical, en dépit de sa relation ténue et tenace avec les émissions de CO2. Nous voici donc à l'affût de tout moyen qui permettrait d’atténuer l’augmentation de l’effet de serre sans avoir à remettre en question nos fondements idéologiques et le mode de vie associé. L’un de ces moyens tient en trois petits mots : “puits de carbone”.
Qu’est-ce qu’un puits de carbone ?
Dans l’idée générale, le puits de carbone est un concept assez simple : un puits de carbone est quelque chose qui absorbe davantage de CO2 qu’il n’en émet dans l’atmosphère, donc qui tend à réduire la teneur en CO2 atmosphérique ; à l’inverse, une source de carbone est quelque chose qui émet davantage de CO2 qu’il n’en absorbe, donc qui tend à augmenter la teneur en CO2 atmosphérique.
Deux puits de carbone naturels*** majeurs sont identifiés sur Terre : les océans et la végétation terrestre. Ensemble, ils absorberaient de l’ordre de 55 % des émissions humaines de CO2 (Figure 2) [3] ; sans ces puits, la teneur en CO2 dans l’atmosphère aurait donc augmenté bien davantage et le changement climatique aurait été plus grave.
Dans ce qui suit, nous allons nous pencher sur le fonctionnement du “puits de carbone forestier”, qui constitue la principale composante de l’effet puits exercé par la végétation, sans pour autant représenter la majeure partie du stock de carbone terrestre. En effet, d’autres écosystèmes comme les prairies, les zones humides ou les savanes peuvent stocker d’importantes quantités de carbone, notamment dans leurs sols. Nous reviendrons plus loin sur cette distinction essentielle entre stock et puits.
Actuellement, le puits de carbone forestier contribue seul à absorber environ 30 % des émissions anthropiques de CO₂ [6, 7]. Si le concept de puits de carbone forestier est simple dans l’idée générale, il comporte tout de même dans le détail une certaine complexité, restant de fait un concept souvent assez mal compris et porteur de beaucoup de fantasmes. L’un des plus répandus consiste à considérer le puits de carbone comme une propriété intrinsèque et permanente de la forêt. La forêt jouerait un “rôle” de puits de carbone [8, 9], comme si c’était une fonction naturelle et un service qu’elle devait naturellement et perpétuellement assurer. Détaillons maintenant le fonctionnement du puits de carbone forestier afin d’essayer de mieux comprendre ce qu’il signifie exactement.
Le puits de carbone à l’échelle de l’arbre
Commençons par l’élément central sans lequel une forêt ne saurait exister : l’arbre. Comme tout être vivant, l’arbre respire, se nourrit et rejette des déchets. Mais une différence fondamentale nous distingue : alors que nous devons consommer d’autres êtres vivants pour nous alimenter, les arbres ont cette capacité extraordinaire de produire leur propre matière à partir de quelques éléments simples — de l’eau et des minéraux puisés dans le sol, et du dioxyde de carbone (CO₂) capté dans l’air.
Ce prodige biologique repose sur un mécanisme bien connu : la photosynthèse. Grâce à ce processus, l’arbre capte du CO₂ atmosphérique et libère de l’oxygène (O₂). En parallèle, comme tout organisme vivant, il respire : il consomme de l’O₂ et rejette du CO₂. Tant que l’arbre est en croissance, il capte plus de carbone par la photosynthèse qu’il n’en relâche par la respiration. Il accumule alors du carbone dans ses tissus — bois, feuilles, racines — et agit ainsi comme un puits de carbone.
Il est essentiel ici de bien distinguer deux notions souvent confondues :
Le stock de carbone correspond à la quantité totale de carbone contenue dans l’organisme de l’arbre à un instant donné.
Le puits de carbone, quant à lui, désigne l’augmentation de ce stock dans le temps — autrement dit, la croissance nette de l’arbre.


Figure 2 : Le cycle global du carbone, avec les principaux stocks et flux de carbone. L’activité humaine tend à émettre de l’ordre de 11 gigatonnes de carbone (GtC) par an (9,7 GtC en brûlant des fossiles, plus 1,1 GtC en changeant la surface du sol), ce qui contribue à élever le stock atmosphérique. Cependant, la végétation et les océans tendent à absorber davantage de carbone qu’ils n’en émettent, constituant ainsi des puits de carbone absorbant de l’ordre de 55 % des émissions humaines de CO2 (3,2 GtC par an pour la végétation plus 2,9 GtC pour les océans, soit 6,1 GtC par an au total). Source : modifié depuis https://essd.copernicus.org/articles/17/965/2025/ [3].


Figure 3 : Le cycle du carbone à l’échelle de l’arbre, avec le stock (l’organisme de l’arbre) et les flux de carbone (photosynthèse et respiration). Lorsque l’arbre est en croissance, il capte davantage de carbone par la photosynthèse qu’il n’en émet par la respiration ; le carbone peut ensuite être ajouté au stock de carbone de l’arbre ; le stock augmente dans le temps et l’arbre est ainsi un puits de carbone transitoire. À l’inverse, à la mort de l’arbre, l’ensemble du carbone contenu dans son organisme retourne à l’atmosphère. L’arbre est alors une source de carbone transitoire. Pour être plus complet, il faudrait ajouter la dynamique de la litière (feuilles et branches qui tombent au sol, où elles sont alors décomposées - auquel cas le carbone retourne à l’atmosphère -, stabilisées ou minéralisées).
Au-delà du mode d’alimentation, l’arbre se distingue aussi par sa capacité à développer des structures gigantesques. Cela est notamment rendu possible par le bois, un matériau à la fois léger et résistant, constitué de longues chaînes carbonées issues de la photosynthèse. Grâce à ce support mécanique, l’arbre peut atteindre des hauteurs considérables. Autre particularité : sa longévité. Certains arbres vivent plusieurs siècles, voire plusieurs millénaires !
C’est cette combinaison — taille et durée de vie — qui permet à l’arbre de constituer à la fois un stock et un puits de carbone importants et durables. Tant qu’il croît, il capte du CO₂ atmosphérique, l’intègre dans sa biomasse, et joue ainsi un double rôle : il est à la fois réservoir (stock) et capteur actif (puits) de carbone. En climat tempéré, cette dynamique est bien visible dans les cernes annuels de croissance que l’on peut observer sur une coupe transversale de tronc : chaque cerne témoigne d’une année d’accumulation de biomasse — et donc de carbone.


Figure 4 : Empilement de cernes annuels de croissance dans une coupe transversale du tronc d’un arbre. Chaque cerne témoigne de l’accumulation de biomasse et de carbone dans l’organisme de l’arbre pendant une année donnée ; tant que l’arbre croît, il représente un puits de carbone car la quantité de carbone que renferme son organisme augmente d’une année sur l’autre. Source de l’image : Manfred Antranias Zimmer de Pixabay (https://pixabay.com/fr/photos/bois-cernes-annuels-grain-structure-618673/).
Mais cette fonction de puits n’est pas éternelle. À terme, lorsque l’arbre meurt, l’ensemble du carbone qu’il a stocké finit par retourner dans l’atmosphère. L’arbre devient alors une source de carbone. Ce retour peut être rapide ou lent, selon les circonstances. Par exemple :
Si l’arbre brûle dans un incendie ou est utilisé comme bois de chauffage, le carbone accumulé pendant des décennies est relâché presque instantanément.
À l’inverse, si l’arbre meurt naturellement et se décompose lentement en forêt, ou s’il est transformé en meuble ou en matériau de construction, le carbone peut rester stocké pendant plusieurs années, voire plusieurs décennies (même si l’arbre n’est évidemment plus un puits de carbone, sa matière peut continuer de stocker une quantité importante de carbone pendant une longue durée).
Dans tous les cas, il s’agit d’un cycle : le carbone capté par l’arbre finit toujours par réintégrer l’atmosphère. Ce cycle peut être plus ou moins long, mais il rappelle que le puits de carbone forestier n’est pas un mécanisme permanent, ni un stockage définitif — c’est un processus dynamique, inscrit dans le temps.
Le puits de carbone à l’échelle de la forêt
A l’échelle d’un arbre individuel, le cycle du carbone est assez facilement compréhensible, avec un puits de carbone transitoire à mesure que l’arbre grandit, puis une source de carbone transitoire quand l’arbre dépérit et se décompose (ou est brûlé).
Les choses se compliquent cependant dès que l’on passe à l’échelle de la forêt. D’abord, en raison du nombre d’arbres à prendre en compte. Et les chiffres donnent le vertige. Avez-vous une idée du nombre d’arbres présents dans un département comme la Meurthe-et-Moselle ? On en compte plus de 100 millions****. Dans une région comme le Grand Est ? Plus de 1 milliard. En France ? Plus de 10 milliards. Et dans le monde ? Plusieurs milliers de milliards (3000 milliards) [10] !
Pour estimer le bilan carbone d’une forêt, il faut donc intégrer les trajectoires de cette multitude d’individus. Tandis que certains arbres sont en pleine croissance et captent du carbone, d’autres viennent à peine de germer, certains dépérissent, d’autres meurent ou sont récoltés. La forêt est un système vivant, en perpétuel renouvellement, où coexistent en permanence des “arbres puits” et des “arbres sources”. C’est cette dynamique collective qui détermine, à un instant donné, si la forêt dans son ensemble agit comme un puits ou comme une source de carbone.


Figure 5 : Le bilan carbone à l’échelle d’une forêt. Pour calculer le bilan carbone à l’échelle d’une forêt, il faut tenir compte de l’ensemble des flux entrants (flèches vertes) et des flux sortants (flèches rouges). L’exercice est complexe, car la forêt est composée d’une multitude d’arbres à des stades de développement différents. Il faut aussi tenir compte des arbres morts, de la litière et du bois mort au sol, de ce qui se passe dans le sol et des usages éventuels du bois après récolte (non représentés sur ce schéma).
Le puits de carbone forestier est une phase transitoire et non une fonction des forêts
Même si la dynamique est plus complexe qu’à l’échelle d’un arbre individuel, on comprend aisément qu’à l’échelle d’une forêt, le puits de carbone reste une phase transitoire d’un cycle, et non une propriété intrinsèque ou une fonction permanente. En d’autres termes, la forêt n’est pas un puits sans fond.
L’effet “puits de carbone” dépend de la dynamique globale de toutes les composantes du bilan carbone forestier. Par exemple, une forêt jeune va avoir tendance à agir comme un puits de carbone car elle est alors composée d’arbres à la croissance importante. Les arbres qui la composent étant de petite dimension, ils constituent cependant un faible stock de carbone.
Par contraste, une forêt mature peut atteindre un état d’équilibre, dans lequel les flux de carbone entrants (liés à la croissance des arbres) sont globalement compensés par les flux sortants (issus de la décomposition du bois mort, de la litière, ou des pertes liées aux perturbations). Dans ce cas, la forêt est “neutre en carbone”. Pourtant, les arbres qui la composent, potentiellement de grande taille, constituent un stock de carbone très important.
Sachant que contrairement à une idée reçue, des forêts composées d’arbres très âgés peuvent tout à fait continuer d’être des puits de carbone [13]. De même, un arbre de très grande dimension peut absorber bien davantage de carbone qu’un jeune freluquet***** [14].
En outre, pour évaluer correctement le bilan carbone d’une forêt, il ne suffit pas de considérer les arbres vivants. Il faut également prendre en compte d’autres compartiments essentiels : le bois mort au sol, la litière, et surtout le sol lui-même. Ces réservoirs contiennent d’énormes quantités de carbone (par exemple, les sols forestiers stockent davantage de carbone que la biomasse aérienne des arbres eux-mêmes ; [11, 12]), sous forme de matière organique ou de composés minéraux carbonatés. Leurs dynamiques — décomposition, minéralisation, stabilisation — influencent donc directement les flux de carbone entre la forêt et l’atmosphère et peuvent jouer un rôle déterminant dans le bilan global.
Enfin, un autre facteur clé entre en jeu : les usages du bois. Nous l’avons vu ci-dessus, le devenir du carbone contenu dans la biomasse d’un arbre récolté dépend en effet fortement de la manière dont le bois est utilisé. Ainsi, le bilan carbone d’une forêt ne dépend pas uniquement de ce qui s’y passe, mais aussi de ce que l’on fait du bois que l’on en extrait. C’est l’ensemble de cette chaîne — de la croissance des arbres à l’usage final du bois — qui conditionne le bilan carbone d’une forêt.
Il n’y a pas que le puits dans la vie
Les exemples précédents l’ont suggéré : le puits de carbone ne suffit pas, à lui seul, à évaluer la contribution d’une forêt au bilan carbone global. Le stock de carbone est tout aussi fondamental. Prenons un exemple volontairement caricatural : une forêt mature, peuplée d’arbres de très grande taille. Cette forêt est globalement à l’équilibre, et ne constitue donc pas un puits de carbone actif (ce qui, comme on l’a vu, n’est pas forcément vrai). Certains pourraient alors s’en agacer : “Cette forêt ne joue plus son rôle de puits de carbone (la vilaine), il faut la rajeunir !” Décision est donc prise de couper les arbres et de les remplacer par des jeunes à la croissance vigoureuse. Résultat : un effet puits de carbone immédiat. Mais à quel prix ? Le stock colossal de carbone contenu dans la forêt mature a été perdu, relâché dans l’atmosphère ou déplacé hors du système forestier. Le bilan carbone de la forêt est donc au final largement défavorable.
Dans un monde où les logiques économiques dominent, une analogie financière peut aider à mieux saisir encore la distinction entre stock et flux. Imaginez un compte bancaire :
La somme d’argent représente le stock.
L’évolution de cette somme dans le temps correspond au flux (positif ou négatif).
Si votre capital augmente, votre compte est un “puits d’argent” ; s’il diminue, c’est une “source”. Maintenant, posez-vous la question suivante : préférez-vous disposer de 100 € avec un taux d’intérêt de 10 % (petit stock, fort flux), ou de 1 000 000 € avec un taux d’intérêt nul (gros stock, flux nul) ? Dans une perspective carbone, une forêt avec un puits faible — voire nul — n’est pas nécessairement problématique si elle constitue en parallèle un immense réservoir de carbone. Autrement dit, une forêt qui n’est plus un puits de carbone n’est pas, en soi, une mauvaise chose — même si l’on se limite à une lecture strictement “carbone” (c’est-à-dire sans même parler d’autres aspects essentiels comme la capacité du milieu à abriter la vie, la santé des sols, etc., non abordés dans cet article).
En définitive, le diagnostic dépend des raisons pour lesquelles la forêt n’est pas un puits. Comme nous l’avons vu, l’absence d’effet puits peut simplement refléter une phase normale du cycle forestier. En revanche, la situation devient préoccupante lorsque la forêt cesse d’être un puits de carbone en raison d’un affaiblissement généralisé de sa vitalité — déclin des arbres, dégradation des sols, perturbations accrues... Dans le prochain article, nous verrons que la conjoncture actuelle tend plutôt vers ce second cas de figure à une échelle globale, faisant peser une menace importante sur la poursuite de l’effet “puits de carbone” des forêts à court terme.
Notes
*Cette terminologie de “rôle”, de “fonction” ou de “service” révèle une vision très anthropocentrique et finalement assez proche du créationnisme, basée sur le dualisme homme/nature et laissant à penser que cette dernière a été créée pour nous servir, et que les fonctions nécessaires à la fourniture de ces services sont des propriétés intrinsèques ayant vocation à perdurer éternellement.
**Ceci est lié à la masse molaire respective des atomes de carbone “C” et d’oxygène “O” liés dans une molécule de CO2 ; la masse molaire du C est de 12g/mol, celle du O de 16 g/mol ; une molécule de CO2 représente donc 44 g/mol (12 + 2 * 16) ; pour convertir une masse de CO₂ en équivalent carbone, on multiplie donc par 12/44 ≈ 0,27, ce qui correspond au rapport entre les masses molaires du carbone (12 g/mol) et du CO₂ (44 g/mol) ; inversement pour convertir du carbone en équivalent CO₂, on multiplie par 44/12 ≈ 3,67.
***Nous n’évoquerons pas dans cet article le développement de puits de carbone artificiels, l’un des rêves de la géoingénierie, mais dont les potentialités sont encore totalement anetoditques relativement aux ordres de grandeur en jeu - https://www.transitionsenergies.com/la-plus-grande-usine-de-capture-du-co2-dans-lamosphere-est-entree-en-service-en-islande/.
****Source : enquête d’Inventaire Forestier National (IFN) de l’IGN (https://ocre-gp.ign.fr/ocre) ; et ce, uniquement pour les arbres dits « recensables » selon les critères de l’IFN, c’est-à-dire ceux dont le diamètre dépasse 7,5 cm à 1,30 m de hauteur.
*****Ce qui est parfaitement logique : même si son taux de croissance relatif est plus faible (par exemple en largeur de cerne), un très gros arbre, du fait de sa taille et de sa surface foliaire considérables, produit en réalité bien plus de matière organique à l’échelle de son organisme qu’un jeune et petit arbre.
Références
[1] S. Evans, « Analysis: Which countries are historically responsible for climate change? », Carbon Brief, 2021. https://www.carbonbrief.org/analysis-which-countries-are-historically-responsible-for-climate-change/
[2] H. Ritchie, P. Rosado, et V. Samborska, « Climate Change. Data adapted from NOAA Global Monitoring Laboratory, United States Environmental Protection Agency », 2025. https://archive.ourworldindata.org/20250624-125417/grapher/co2-long-term-concentration.html
[3] P. Friedlingstein, M. O'Sullivan, M.W. Jones, R. Andrew et al., « Global Carbon Budget 2024 », Earth Syst. Sci. Data, 17, 965–1039, 2025. https://doi.org/10.5194/essd-17-965-2025
[4] H. Ritchie, P. Rosado, et M. Roser, « CO₂ and Greenhouse Gas Emissions », Our World In Data, 2023. https://ourworldindata.org/co2-and-greenhouse-gas-emissions
[5] IPCC, « IPCC, 2021: Summary for Policymakers ». In: Climate Change 2021: The Physical Science Basis. Contribution of Working Group I to the Sixth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change [Masson-Delmotte, V., P. Zhai, A. Pirani, S.L. Connors, C. Péan, S. Berger, N. Caud, Y. Chen, L. Goldfarb, M.I. Gomis, M. Huang, K. Leitzell, E. Lonnoy, J.B.R. Matthews, T.K. Maycock, T. Waterfield, O. Yelekçi, R. Yu, and B. Zhou (eds.)], 2021. https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg1/chapter/summary-for-policymakers/
[6] Yude Pan et al., « A Large and Persistent Carbon Sink in the World’s Forests », Science 333,988-993, 2011. https://www.science.org/doi/10.1126/science.1201609
[7] Y. Pan, R.A. Birdsey, O.L. Phillips, et al., « The enduring world forest carbon sink », Nature 631, 563–569, 2024. https://www.nature.com/articles/s41586-024-07602-x
[8] Académie des sciences, « Communiqué de presse | Forêt et changement climatique : menace sur le puits de carbone forestier français », Académie des sciences, 2023. https://www.academie-sciences.fr/communique-de-presse-foret-et-changement-climatique-menace-sur-le-puits-de-carbone-forestier
[9] P. Mouterde, « La forêt française, un puits de carbone en péril », Le Monde, 2023. https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/06/06/la-foret-francaise-un-puits-de-carbone-en-peril_6176474_3244.html
[10] T. Crowther, H. Glick, K. Covey, et al., « Mapping tree density at a global scale », Nature 525, 201–205, 2015. https://www.nature.com/articles/nature14967
[11] R. K. Dixon et al., « Carbon Pools and Flux of Global Forest Ecosystems », Science 263, 185-190 1994. https://www.science.org/doi/10.1126/science.263.5144.185
[12] R. Lal, « Forest soils and carbon sequestration », Forest Ecology and Management 220, 242-258 2005. https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0378112705004834
[13] S. Luyssaert, E.D. Schulze, A. Börner, et al., « Old-growth forests as global carbon sinks ». Nature 455, 213–215, 2008. https://www.nature.com/articles/nature07276#citeas
[14] N. Stephenson, A. Das, R. Condit, et al., « Rate of tree carbon accumulation increases continuously with tree size », Nature 507, 90–93, 2014. https://www.nature.com/articles/nature12914
[15] Transition énergies, « La plus grande usine de capture du CO2 dans l’atmosphère est entrée en service en Islande », 2024. https://www.transitionsenergies.com/la-plus-grande-usine-de-capture-du-co2-dans-lamosphere-est-entree-en-service-en-islande/
Conclusion
Le puits de carbone n’est ni une fonction, ni un rôle, ni une propriété intrinsèque des forêts. Il s’agit d’une phase transitoire dans un cycle plus vaste, marqué par des échanges constants de carbone entre la forêt et l’atmosphère.
Cette phase dépend de nombreux facteurs : la croissance des arbres, bien sûr, mais aussi leur mortalité, la régénération naturelle, ou encore l’accumulation et la décomposition de la matière organique dans les sols.
Depuis plusieurs décennies, les forêts ont effectivement eu un effet “puits de carbone” majeur. Et fort heureusement pour nous : sans cette contribution, l’augmentation de l’effet de serre et le réchauffement climatique auraient été bien plus marqués.
Mais une question s’impose désormais, et elle inquiète à juste titre : les forêts continueront-elles à jouer ce rôle dans les années à venir ? Peut-on vraiment compter sur la persistance de cet effet “puits” pour éviter de remettre en cause notre modèle de développement thermo-industriel ? La réponse dans le prochain article.
Henri Cuny