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Des articles de fond sur l'Anthropocène

L'histoire de la population humaine et la singularité démographique de l’Anthropocène

Henri Cuny - 19/01/2025

De 1 milliard d'humains en 1805 à 8 milliards en 2022 ! L’Anthropocène ou le temps d’une croissance fulgurante de la population humaine

Notre espèce existerait depuis 300 000 ans environ [1]. En octobre 2022, sa population a dépassé un nouveau seuil symbolique, avec le recensement de plus de 8 milliards d’habitants humains Homo sapiens* sur Terre. Une nouvelle qui a à peine fait sourciller la plupart d’entre nous. Il faut dire que nous étions alors accaparés par le comptage des morts de la Covid19, effectivement nombreux dans l’absolu, mais ne constituant cependant qu’une infime partie de la population mondiale.

Nous sommes des milliards, et cela semble donc être devenu une banale évidence pour la majorité d’entre nous, comme s’il en avait toujours été ainsi. Pourtant, nous allons voir que loin d’une normalité, la population actuelle et sa dynamique récente constituent des singularités à peine croyables lorsqu’elles sont mises en regard de l’histoire de notre espèce sur le temps long. Nous sommes plus de 8 milliards, et il s’agit tout simplement d’une extraordinaire anomalie, au sens propre du terme. Tâchons maintenant de détailler pourquoi.

L’histoire sur le temps long de la taille de la population des humains Homo sapiens et la singularité de l’Anthropocène

Commençons par prendre du recul sur la situation présente en regardant la dynamique de la population humaine sur le temps long (Figure 1).

Graphique de l'évolution de la population humaine mondiale depuis douze mille ans
Graphique de l'évolution de la population humaine mondiale depuis douze mille ans

Figure 1 : Évolution de la population humaine (Homo sapiens) depuis 100 000 ans. Source des données : Our World in Data (https://ourworldindata.org/population-growth#explore-data-on-population-growth) [2].

On retient plusieurs enseignements de ce graphique :

  • Il n’y a, ni de près ni de loin, jamais eu autant d’humains sur Terre qu’au cours de la période récente.

  • Avant 1800, il existe sur le temps long une tendance générale à l’augmentation progressive de la population (avec cependant des phases possibles de baisse transitoire, non visibles sur le graphique car écrasées par l’échelle), qui reste cependant comprise entre quelques milliers et quelques millions d’individus durant des centaines de milliers d’années.

  • Depuis quelques décennies prend place une augmentation extrêmement brutale de la population mondiale.

  • Alors que près de 300 000 ans avaient été nécessaires pour atteindre une population de 1 milliard d’humains Homo sapiens, la population est passée en un peu plus de 200 ans de 1 milliard (en 1805) à 8 milliards (en 2022) d’habitants.

  • Des événements meurtriers comme la Première Guerre mondiale (suivie de la grippe espagnole) ou la Seconde Guerre mondiale ne sont pas détectables sur le graphique, tant la dynamique de croissance est puissante. Il est inutile de rechercher la trace d’un épisode comme la Covid19, tant ce-dernier ne constitue qu’un épiphénomène du point de vue de la dynamique globale de la population.

Il est possible de remonter encore plus loin dans le temps, même si les estimations anciennes de la population mondiale sont naturellement empreintes de fortes incertitudes. On estime ainsi qu’il y a 100 000 ans, il y’avait approximativement entre 100 000 et 300 000 individus Homo sapiens sur Terre [3].

Certains ont avancé l’idée que la population de notre espèce était passée par un "goulot d’étranglement" il y a environ 70 000 ans avec la catastrophe de Toba**, avec seulement quelques milliers d’individus subsistants [4]. Des études ultérieures ont cependant plutôt infirmé cette hypothèse [3, 5].

Quoi qu’il en soit, la dynamique sur le temps long révèle une tendance générale à l’augmentation de la population, qui oscillait donc entre quelques dizaines et quelques centaines de milliers d’individus il y a plus de 50 000 ans, atteignait 4 millions d’individus il y a 12 000 ans et autour de 200 millions d’individus en 0. Il est cependant clair que ces chiffres et cette dynamique sont sans commune mesure avec ce qui se passe depuis quelques décennies : replacée sur le temps long, la période récente apparaît tout simplement comme une soudaine anomalie ! Elle constitue la singularité démographique de l’Anthropocène.

Une autre façon d’appréhender la singularité de la dynamique récente est de regarder le temps qui a été nécessaire pour atteindre chaque milliard d’habitants supplémentaire (Figure 2).

Temps nécessaire pour atteindre chaque milliard d'habitants supplémentaire dans le monde
Temps nécessaire pour atteindre chaque milliard d'habitants supplémentaire dans le monde

Figure 2 : Temps nécessaire pour atteindre chaque milliard d’habitants supplémentaire dans la population mondiale. Attention, l'échelle des ordonnées n'est pas linéaire mais en logarithme. Source des données : Our World in Data (https://ourworldindata.org/population-growth#explore-data-on-population-growth) [2].

Il a fallu attendre le tout début du 19e siècle, soit environ 300 000 ans si l’on considère la date d’apparition de notre espèce [1], pour atteindre le premier milliard d’humains Homo sapiens sur Terre (ce qui confirme l’adage des milliardaires selon lequel le premier milliard est toujours le plus difficile !). Après cela, les temps se sont incroyablement raccourcis : 120 ans ont été nécessaires pour atteindre le 2e milliard, 35 ans pour le 3e et moins de 15 ans pour chaque milliard successif !

On peut enfin s’attarder sur le temps nécessaire au doublement de la population. Alors que 262 ans ont été nécessaire pour que la population double de 0,5 milliard (1543) à 1 milliard (1805), il a fallu 120 ans pour passer de 1 à 2 milliards (1805-1925), 49 ans pour passer de 2 à 4 milliards (1925-1974) et 48 ans pour passer de 4 milliards à 8 milliards (1974-2022).

Cette hausse soudaine de la population s’explique notamment par un fort allongement de la durée de vie, ainsi que par une baisse considérable de la mortalité infantile. Avant 1800, les humains vivaient en moyenne moins de 30 ans et plus de 40 % des enfants mouraient avant 5 ans [6, 7] ; des chiffres qui paraissent impensables et intolérables aujourd’hui ! En 2024, l’espérance de vie a dépassé 73 ans et moins de 5 % des enfants meurent avant 5 ans [6, 7] !

N’étant pas spécialiste, je ne m’attarderai pas ici sur les causes profondes de ces changements spectaculaires. L’époque est certes marquée par d’impressionnants progrès médicaux et une hausse fulgurante des rendements agricoles, mais ces évolutions dépendent elles-mêmes de nombreux facteurs, si bien qu’il reste difficile de démêler précisément les causalités.

On peut néanmoins affirmer que la grande disponibilité énergétique offerte par les ressources fossiles constitue un facteur crucial. En permettant la mécanisation de nombreuses tâches et la production d’immenses quantités d’intrants agricoles, elle a en effet assuré l’apport calorique qui sous-tend la croissance de la population et donné la possibilité à beaucoup d’entre nous de consacrer du temps à d’autres tâches que la production alimentaire (recherche médicale, soins aux personnes…).

Une singularité qui débute à des moments différents selon les régions du monde

L’observation de la dynamique de la population au cours des derniers siècles par continent montre que la singularité de l’Anthropocène n’a pas débuté au même moment dans l’espace (Figure 3).

C’est en Europe que la croissance brutale de la population est le plus tôt visible, dès le 18e siècle. Par contraste, en Asie et plus encore en Afrique, la singularité apparaît plus tardivement, puisqu’elle ne survient qu’à partir du milieu du 20e siècle et le début de la grande accélération. Ce sont bien les dynamiques de ces deux continents qui pilotent la dynamique globale actuelle, puisqu’ils renferment près de 80 % de la population mondiale et sont ceux où la croissance est la plus forte.

Pour illustrer ce décalage temporel, on peut regarder l’évolution de la population entre deux périodes successives de cent ans (1820-1920 et 1920-2020). Entre 1820 et 1920, la population a été multipliée par 2 en Europe, par 1,4 en Asie et par 1,8 en Afrique. Entre 1920 et 2020, elle a été multipliée par 1,6 en Europe, 4,4 en Asie et 9,2 en Afrique !

L’Amérique présente une situation intermédiaire, avec une croissance forte de la population à partir du 19e siècle, après qu’elle a connu une terrible décroissance au 16e siècle suite à la colonisation***.

Évolution de la population par continent depuis six cents ans
Évolution de la population par continent depuis six cents ans

Figure 3 : Évolution de la population humaine par continent depuis 600 ans. Source des données : Our World in Data (https://ourworldindata.org/population-growth#explore-data-on-population-growth) [2].

Vers un ralentissement de la croissance démographique, voire une "croissance négative"****…

Même si cela reste encore peu voire pas visible sur la courbe générale (Figure 1), les signaux montrent que l’incroyable croissance démographique observée ces dernières décennies est à un tournant et tend à un ralentissement. Ainsi, le taux annuel de croissance de la population (augmentation annuelle de la population mondiale rapportée à sa taille) s’est effondré au niveau mondial au cours des dernières années (Figure 4). Alors que la population augmentait annuellement de 2 % environ au cours des années 1960-1970, le taux annuel d’accroissement est aujourd’hui de moins de 1 %.

Il faut cependant dire que si le taux réduit, il s’exerce sur une population toujours plus grande, si bien qu’en absolu la croissance demeure très forte : ces dernières années, la population a augmenté d’environ 70 millions d’habitants par an, un chiffre équivalent à celui observé dans les années 1960-1970 lorsque le taux de croissance de la population était maximal (mais la population moindre, donc).

Ce taux annuel correspond à environ 192 000 habitants supplémentaires par jour, ou 8000 habitants supplémentaires par heure, ou un peu plus de 130 habitants supplémentaires par minute. Durant les 5 minutes que vous passerez à lire cet article, ce seront donc environ 650 humains supplémentaires qui peupleront la Terre. 192 000 habitants par jour, c’est l’équivalent de la population mondiale d’il y a 12 000 ans (4 millions d’habitants) qui s’ajoute tous les 21 jours environ.

Si la croissance reste donc forte, les signes d’un changement de dynamique sont néanmoins patents, avec la diminution de la croissance annuelle et l’effondrement du taux annuel de croissance de la population. Cette inflexion s’explique notamment par une baisse importante de la natalité dans certaines régions du monde (en partie compensée par l’allongement de la durée de vie, ce qui conduit d’ailleurs à un vieillissement de la population) [8], accompagnée d’une spectaculaire baisse de la fertilité masculine [9].

Actuellement, le taux de fécondité mondial est de 2,3 enfants par femme, alors qu'il était de 3,3 en 1990 [8]. Le taux de fécondité reste élevé dans certains régions (4,3 enfants par femme en Afrique subsaharienne, 2,7 en Afrique du Nord et en Asie occidentale), mais plus de la moitié des pays et des régions du monde (France, États-Unis, Japon, Russie…) présentent un taux en deçà du seuil de remplacement de 2,1 naissances vivantes par femme (c’est à dire du taux assurant un maintien de la population à son niveau actuel), avec même des taux inférieurs à 1,4 enfants par femme dans certains pays (Chine, Italie, République de Corée, Espagne…) (Figure 5).

Évolution du taux de croissance de la population mondiale depuis 1800
Évolution du taux de croissance de la population mondiale depuis 1800

Figure 4 : Évolution du taux annuel de croissance (augmentation annuelle de la population rapportée à sa taille) et de la croissance annuelle de la population mondiale depuis 1800. Pour chaque graphique, les points correspondent aux valeurs annuelles dans les données ; la ligne révèle la tendance générale (lissage par modèles additifs généralisés). Source des données : Our World in Data (https://ourworldindata.org/population-growth#explore-data-on-population-growth) [2].

Carte mondiale du taux de fécondité par pays en 2024
Carte mondiale du taux de fécondité par pays en 2024

Figure 5 : Carte mondiale du taux de fécondité (nombre d'enfants par femme) par pays en 2024. Dans une majorité de pays du monde, le taux de fécondité est déjà en-dessous du seuil assurant le maintient de la population (2,1 enfants par femme). Source de la figure : Wikipédia. Korakys, CC BY-SA 4.0 <https://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0>, via Wikimedia Commons. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Total_Fertility_Rate_Map_by_Country.svg.

De quoi nous mener demain à un grand hiver démographique (ou crash démographique), comme semblent s’en inquiéter certains [10, 11, 12, 13] ?

Évolution de la croissance de la population mondiale depuis 1800
Évolution de la croissance de la population mondiale depuis 1800

… jusqu’à un grand hiver démographique ?

Le problème avec les milliardaires, c’est qu’ils n’en ont jamais assez : malgré la hausse sans précédent relatée ci-dessus, ayant soudainement portée la population à un niveau inédit de plus de 8 milliards d’humains, certains craignent que la chute de la natalité, particulièrement forte dans certains pays, conduise tous simplement à une extinction de l’humanité, rien que ça [14, 15] !

Qu’en-est il vraiment ? Les travaux prospectifs sur la démographie prévoient-ils la disparition de notre espèce ? Projeter la population future reste bien entendu un exercice délicat compte tenu du caractère par nature imprévisible du futur, mais l’ONU fait autorité en la matière et réalise des projections selon un grand nombre de scénarios, ce qui permet de couvrir une large gamme de possibles [16].

Le graphique ci-dessous (Figure 6) représente l'évolution historique de la population et les tendances projetées par l’ONU selon 3 scénarios, le scénario “moyen” étant généralement le plus repris :

Les résultats suggèrent qu’il est fortement probable que la population humaine passe son pic dans le courant du 21e siècle. Quel que soit le scénario, la population continue d’augmenter d’ici 2050. En 2100, le scénario "moyen" projette un plateau haut à environ 10 milliards d'humains, là où le scénario "haut" simule une augmentation continue jusqu’à plus de 14 milliards ! Le scénario "bas" est le seul à prévoir une baisse notoire de la population, qui retomberait à 7 milliards d’individus, un chiffre qui reste incroyablement élevé relativement à la population humaine sur le temps long.

Donc oui, notre espèce fait de moins en moins d’enfants. Mais rassurons les inquiets de la démographie : l’humanité ne va pas s’éteindre en raison d’une baisse de la croissance, voire d’une diminution, de sa population. Si la chute de la natalité dans certains pays est problématique du point de vue du fonctionnement de notre système, fondé sur l’ambition aussi imbécile que vaine d’une croissance perpétuelle, l’extinction de la vie non-humaine qui se produit en parallèle de l’explosion de vie humaine, le changement climatique, le développement des armements toujours plus meurtriers et les tensions géopolitiques font courir des risques infiniment plus grands à l’humanité et devraient être source de bien plus d’inquiétudes à n’importe quel esprit rationnel.

Population mondiale depuis 1800 et projections jusqu'à 2100 selon trois scénarios de l'ONU
Population mondiale depuis 1800 et projections jusqu'à 2100 selon trois scénarios de l'ONU

Figure 6 : Tendance historique de la population mondiale depuis 1800 et projections réalisées par l’ONU à l’horizon 2100 selon trois scénarios. Source des données : UN World Population Prospects 2024 (https://population.un.org/wpp/)  [16].

Notes

* Comme on le fait généralement, j’utiliserai ici des raccourcis comme "taille de la population" ou "nombre d’habitants" pour parler spécifiquement de la population des humains Homo sapiens, mais il convient de rappeler que ces-derniers ne sont que l’une des innombrables formes de vie habitant la planète, et que, même si nous l’avons oublié, l’espèce Homo sapiens a longtemps coexisté avec d’autres espèces d’humains sur Terre.

** Une éruption explosive extraordinaire du volcan Toba en Indonésie qui serait survenue il y a 73 000 ans et aurait duré 2 semaines, causant un hiver volcanique qui dura de 6 à 10 ans suivi d'un refroidissement global s'étendant sur environ un millénaire.

*** La (re)découverte de l’Amérique s’est traduite par l’une des plus terribles hécatombes de l’histoire de l’humanité, et même probablement la pire relativement à la taille de la population mondiale. Les conquistadors ont fait disparaître des peuples entiers et ont poussé l’ensemble des Amérindiens à un pas de l’extinction, certes principalement en apportant quantité de maladies contre lesquelles ils n’étaient pas immunisés, mais aussi en les spoliant, en les asservissant, en les persécutant et en les massacrant. En 1492, la population d’Amérindiens atteignait peut-être 60 millions d’individus ; un siècle plus tard, ils n’étaient plus que 4 millions [17]. Cela veut dire que la colonisation avait provoqué la disparition de plus de 90 % de la population d’Amérindiens, soit 10 % de la population mondiale.

**** Expression stupide parfois utilisée par des économistes ou des politiciens stupides pour éviter de parler de récession.

Références

[1] J.-J. Hublin et al., « New fossils from Jebel Irhoud, Morocco and the pan-African origin of Homo sapiens », Nature, vol. 546, no 7657, p. 289‑292, 2017. https://www.nature.com/articles/nature22336

[2] H. Ritchie et al., « Population Growth », Our World in Data. 2023. https://ourworldindata.org/population-growth

[3] P. Sjödin, A. E. Sjöstrand, M. Jakobsson, et M. G. B. Blum, « Resequencing Data Provide No Evidence for a Human Bottleneck in Africa during the Penultimate Glacial Period », Mol. Biol. Evol., vol. 29, no 7, p. 1851‑1860, 2012. https://academic.oup.com/mbe/article/29/7/1851/1070885

[4] S. H. Ambrose, « Late Pleistocene human population bottlenecks, volcanic winter, and differentiation of modern humans », J. Hum. Evol., vol. 34, no 6, p. 623‑651, 1998. https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0047248498902196

[5] J. Hawks, K. Hunley, S.-H. Lee, et M. Wolpoff, « Population Bottlenecks and Pleistocene Human Evolution », Mol. Biol. Evol., vol. 17, no 1, p. 2‑22, 2000. https://academic.oup.com/mbe/article/17/1/2/975516

[6] S. Dattani, L. Rodés-Guirao, H. Ritchie, E. Ortiz-Ospina, et M. Roser, « Life Expectancy », Our World Data. 2023. https://ourworldindata.org/life-expectancy

[7] S. Dattani, F. Spooner, H. Ritchie, et M. Roser, « Child and Infant Mortality », Our World Data. 2023. https://ourworldindata.org/child-mortality

[8] M. Roser, « Fertility Rate », Our World Data. 2014. https://ourworldindata.org/fertility-rate

[9] H. Levine et al., « Temporal trends in sperm count: a systematic review and meta-regression analysis of samples collected globally in the 20th and 21st centuries », Hum. Reprod. Update, vol. 29, no 2, p. 157‑176, 2023. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/36377604/

[10] L. Ferry, « Dénatalité, pourquoi c’est grave» », Le Figaro. 2025. https://www.lefigaro.fr/vox/societe/luc-ferry-denatalite-pourquoi-c-est-grave-20250103

[11] N. Silbert, « La France rattrapée par l’hiver démographique », Les Echos. 2024. https://www.lesechos.fr/economie-france/conjoncture/la-france-rattrapee-par-lhiver-demographique-2131637

[12] R. Legendre, « Hiver démographique : cette crise dont personne ne parle », l’Opinion. 2022. https://www.lopinion.fr/economie/hiver-demographique-cette-crise-dont-personne-ne-parle

[13] France Culture, « L’Italie face à son hiver démographique », France Culture. 2024. https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-grand-reportage/l-italie-face-a-son-hiver-demographique-8651860

[14] Le Parisien, « La fantasque milliardaire Elon Musk dit souhaiter à la planète "plus de bébés et de pétrole" »  - Le Parisien. 2022. https://www.leparisien.fr/high-tech/la-fantasque-milliardaire-elon-musk-dit-souhaiter-a-la-planete-plus-de-bebes-et-de-petrole-29-08-2022-BS3GHSNYXRB7XAEJFBNHLJUO3U.php

[15] C. Hessoun, « Elon Musk avertit plusieurs pays d’une catastrophe à venir », La Nouvelle Tribune. 2024. https://lanouvelletribune.info/2024/12/elon-musk-avertit-plusieurs-pays-dune-catastrophe-a-venir/

[16] United Nations, « World Population Prospects 2024: Summary of Results. UN DESA/POP/2024/TR/NO. 9. New York: United Nations. », 2024. https://population.un.org/wpp/publications

[17] A. Koch, C. Brierley, M. M. Maslin, et S. L. Lewis, « Earth system impacts of the European arrival and Great Dying in the Americas after 1492 », Quat. Sci. Rev., vol. 207, p. 13‑36, 2019. https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0277379118307261

Conclusion

L’histoire de la population humaine Homo sapiens, vieille de 300 000 ans environ, est celle d’une longue et progressive augmentation, qui a pris place durant des dizaines de milliers d’années avant la croissance soudaine et d’incroyable ampleur observée ces dernières décennies. Cette hausse brutale et sans précédent a conduit au peuplement de la Terre par plus de 8 milliards d’humains, alors que la population des millénaires précédents n'avait jamais dépassé quelques milliers à quelques centaines de millions d’habitants.

Cette singularité démographique de l’Anthropocène interroge naturellement sur le futur de la population humaine. La croissance fulgurante des dernières décennies arriverait à son terme, avec déjà un ralentissement de la croissance observée globalement et même une diminution de la population dans certaines régions du monde. Cette dynamique s’explique notamment par une baisse importante du taux de fécondité, qui est déjà passé au-dessous du seuil assurant le renouvellement de la population dans une majorité de pays.

De quoi craindre un "hiver démographique" menant jusqu’à la disparition de l’espèce humaine ? Aucun risque de ce côté-là : le nombre d’humains est tel que même si une baisse importante de la fécondité pourra certes conduire à une diminution de la population, celle-ci restera néanmoins et pendant longtemps à un niveau inconnu durant les centaines de milliers d’années précédentes.

Outre le développement des armements (et donc de la bêtise de notre espèce), le danger vient bien de l’altération de l’environnement et de l’anéantissement biologique des non-humains, qui se déroulent de manière troublante en parallèle de l’hyper-expansion de la forme de vie humaine. De quoi penser que la croissance démographique et une certaine "surpopulation", et non pas la baisse de la natalité ou la baisse éventuelle de la population humaine, constituent un danger majeur de l’Anthropocène ? Nous aborderons cette question délicate dans le prochain article.

Henri Cuny